CAPES externe de mathématiques
Deuxième composition
Session 2007
Introduction
Dans tout le problème,
n désigne un entier naturel non nul. On munit
du produit scalaire usuel :
et on définit la norme d'un vecteur
par
Soit
a un vecteur de
non nul, on note
sa la symétrie orthogonale de
dans
définie par
On dit qu'une partie
R de
est un
système de racines dans
si elle vérifie les conditions suivantes :
la partie
R est finie, ne contient pas 0 et engendre le
-espace vectoriel
;
pour tout
(en particulier
) ;
pour tous
;
pour tout
, les seuls éléments de
R proportionnels à
sont
et
.
Les coefficients
sont appelés les
coefficients de structure du sytème de racines
R.
On dit que deux systèmes de racines
R et
R' sont des
systèmes de racines isomorphes s'il existe un isomorphisme d'espaces vectoriels
vérifiant
Dans la partie I, on étudie les systèmes de racines du plan. Cette partie permet de se familiariser avec cette notion et d'avoir des exemples sur les quels s'appuyer pour la suite du problème. Puis dans la partie II, on étudie des relations d'ordre total compatibles avec la structure d'espace vectoriel de
. Cette partie est indépendante de la partie I. Ces relations d'ordre permettront, dans la partie III, d'extraire d'un système de racines une base de
. Même si le fait d'avoir traité la partir I permet de mieux aborder celle-ci, le seul résultat utile est rappelé en début de la partie III et pourra être admis. Seule la dernière question dépend de la partie I. La partie IV est consacrée à l'étude d'un groupe engendré par les symétries associées à un système de racines. On montrera que les symétries associées à une base suffisent à engendrer le groupe. Pour cela, on utilisera des résultats établis dans la partie III. Ensuite, dans la partie V, on étudiera les groupes diédraux et on montrera qu'ils sont engendrés par deux éléments d'ordre 2. Cette partie est indépendante de ce qui précède (sauf pour traiter la dernière question). Dans la partie VI, on associe à un système de racines un ensemble de parties connexes de
sur lequel agit le groupe défini dans la partie IV. On montre ensuite, par des arguments de dualité et de topologie, que toutes les bases extraites du système de racines sont en bijection avec ces connexes. Cette partie se finit en montrant que le groupe agit simplment transitivement sur l'ensemble de ces connexes et sur l'ensemble des bases du système de racines.
Partie I. Systèmes de racines dans
Dans cette partie, on supposera
n = 2. Soit
R un système de racines de
. Pour
, on note
l'angle géométrique entre
et
, i.e. le nombre réel compris entre 0 et
défini par
1. Soit
.
a) Montrer que
.
b) En déduire les valeurs possibles de
.
c) Montrer que le couple
ne peut pas prendre les valeurs (1 , 4), (4 , 1), (-1 , -4) et (-4 , -1).
d) Pour
, montrer que
et déduire les valeurs possibles du rapport
.
e) En supposant
, présenter sous forme d'un tableau, les différentes valeurs de
.
2. Dessiner les figures correspondant à quatre systèmes de racines dans
non deux à deux isomorphes (dans chacun des cas, l'une des racines devra être (1 , 0)). On les ordonnera dans l'ordre croissant du nombre de racines et on les appellera
A1 ×
A1,
A2,
B2 et
G2 (ayant respectivement 4, 6, 8 et 12 racines).
3. Soit
une racine de
R de norme minimale. Supposons qu'il existe une racine
de
R non proportionnelle et non orthogonale à
. Quitte à transformer
R par une rotation, une homothétie ou une symétrie orthogonale d'axe
(qui laissent invariants les coefficients de structure du système de racines), on peut supposer
et
de deuxième coordonnée strictement positive.
a) Montrer que
. En posant
montrer que
.
Quitte à remplacer
par
, on supposera
et d'après le tableau des valeurs de
trois cas peuvent se présenter.
b) cas 1 : Supposons que
et
. Calculer
et
et représenter graphiquement les quatre racines
. En déduire que
. En supposant qu'il existe
, montrer qu'alors l'angle entre
et une racine de
B2 est inférieur à
. En conclure que
R =
B2.
c) cas 2 : Supposons que
. Calculer
et les représenter graphiquement ainsi que
et
. En déduire que
. En raisonnant par l'absurde, montrer que
R =
G2.
d) cas 3 : Supposons que
et
. Calculer
et en déduire que
. Supposons que
, soit
. Montrer que l'angle entre
et deux vecteurs adjacents de
A2 est égal à
. Quitte à réindexer les éléments de
A2, montrer qu'on peut supposer
. En déduire que
R =
G2.
4. En conclure qu'à isomorphisme près, il n'y a que quatre systèmes de racines dans
.
Partie II. Relations d'ordre dans
Une relation d'ordre
sur
est dite compatible avec la structure d'espace vectoriel de
si elle vérifie les deux conditions suivantes :
;
.
La relation d'ordre strict associée est notée
.
1. Soit
une relation d'ordre total sur
compatible avec la structure d'espace vectoriel.
a) Montrer que
b) Soit
(le groupe linéaire de
). On définit une relation par : pour
, on a
. Montrer que
est une relation d'ordre total sur
compatible avec la structure d'espace vectoriel.
2. On définit une relation
sur
par : pour
et
, on a
si
a) En munissant le plan
d'un repère
, représenter graphiquement la partie
en la hachurant d'une couleur particulière.
b) Montrer que la relation
est une relation d'ordre total sur
compatible avec la structure d'espace vectoriel. Cet ordre est appelé
l'ordre lexicographique.
Partie III. Base d'un système de racines
On supposera
n quelconque. Soit
R un système de racines de
. Les résultats obtenus en I.1.e restent vrais, même si la dimension n'est plus 2. En particulier, pour deux racines
distinctes, si
, l'un des deux coefficients
est égal à 1.
On appelle
base du système de racines R une partie
B de
R telle que
la famille
B est une base de l'espace vectoriel
,
tout élément de
R est combinaison linéaire d'éléments de
B, à coefficients entiers, soit tous positifs ou nuls, soit tous négatifs ou nuls.
L'objet de cette partie est de mettre en évidence de telles bases.
1. On munit
d'une relation d'ordre total
compatible avec la structure d'espace vectoriel. On note alors
R+ l'ensemble des racines positives et
R- l'ensembledes racines négatives, c'est à dire :
On appelle
racine simple une racine positive qui n'est pas somme de deux racines positives et on note
B l'ensemble des racines simples.
a) Montrer que tout élément de
R+ est soit dans
B, soit somme de deux racines positives strictement plus petites.
b) Montrer que tout élément de
R+ est combinaison linéaire d'éléments de
B à coefficients entiers positifs ou nuls. (
Indication : On pourra ordonner les éléments de R+ et faire une démonstration par récurrence ou raisonner par l'absurde).
2. Soit deux racines disctintes
.
a) Montrer que si
, alors
.
b) Supposons que
. Montrer que
.
3. Soient
des racines simples deux à deux distinctes et soient
des réels positifs tels que
Montrer que les réels
sont tous nuls.
(Indication : On pourra poser et montrer que .)
4. Montrer que B est une base de l'espace vectoriel . (On dit que B est une base du système de racines R, associée à l'ordre sur ).
5. En munissant de l'ordre lexicographique, pour chacun des quatre systèmes de racines, dessiner d'une couleur particulière les vecteurs de la base associée.
Partie IV. Groupe de Weyl d'un système de racines
Soit
R un système de racines de
,
une relation d'ordre total sur
compatible avec la structure d'espace vectoriel,
R+ l'ensemble des racines positives et
B la base de
R associée à la relation d'ordre. On appaelle
groupe de Weyl de
R, noté
W, le sous-groupe des automorphismes de l'espace vectoriel
, engendré par les symétries
.
1. Soit
et soit
(le groupe orthogonal de
). Etablir que
2. Montrer que le groupe de Weyl
W est un groupe fini.
3. a) Soit
. Montrer qu'il existe
tel que
(Ind : on pourra utiliser III.1.b et développer ). En déduire que
et que
.
b) Soit
tels que
. Montrer que
.
4. On note
WB le sous-groupe de
W engendré par les applications
et on pose
a) Moontrer que
.
(Ind : On pourra raisonner par l'absurde).
b) En déduire que
R =
S.
(Ind : On poura remarquer que pour ).
c) Conclure que
W =
WB.
Partie V. Groupes diédraux
1. Soit
E un plan affine euclidien orienté. Soit
. On appelle groupe diédral d'ordre 2
p, noté
D2p, le groupe des isométries laissant invariant un polygone régulier
à
p sommets, parcourus dans le sens direct. On posera
Mp =
M0.
a) Montrer que le sous-groupe
Cp de
D2p constitué des isométries directes, est un groupe cyclique d'ordre
p engendré par la roration
de centre
O et d'angle
où
O est le centre du polygone
.
b) Préciser une symétrie orthogonale
laissant le polygone
invariant.
c) Montrer que
et en déduire que
D2p est un groupe d'ordre 2
p.
d) Soit
. Montrer que
.
2. Soit
G un groupe fini engendré par deux éléments distincts
s et
s' d'ordre 2. On pose
r =
ss' et on note
p l'ordre de
r. On note
e l'élément neutre de
G.
a) Montrer que
G est engendré par
r et
s.
b) Etablir que
sr =
r-1s, puis que
srk =
rp-ks pour tout
. En déduire que
.
c) Montrer que pour tout
(on pourra raisonner par l'absurde et montrer que G serait commutatif, puis que G = {e , r}). En déduire que
G est d'ordre 2
p.
d) Montrer que
G est isomorphe à
D2p.
e) Déterminer les groupes de Weyl associés aux systèmes de racines de
.
Partie VI. Chambres de Weyl
Soit
R un système de racines de
et
W le groupe de Weyl associé. Pour tout
, on note
l'hyperplan orthogonal à
.
1. Montrer que
est une partie ouverte de
.
La partie
est réunion finie disjointe de parties non vides ouvertes connexes de
, ce sont les
chambres de Weyl du système de racines
R.
2. Soit
C une partie connexe non vide de
incluse dans
. Montrer qu'il existe une chambre de Weyl de
R contenant
C.
3. Montrer que le groupe de Weyl
W permute les hyperplans
ainsi que les chambres de Weyl.
4. Soient
C1 et
C2 deux chambres de Weyl de
R et soit
.
a) Justifier l'existence d'un élément
tel que
b) On pose
. Montrer que
.
(Indication : On pourra supposer qu'il existe tel que et montrer qu'il existe tel que et que .
c) En déduire
. On dit que le groupe
W opère transitivement sur les chambres de Weyl de
R.
5. Soit
une base de
R et soit
la base duale de
B pour le produit scalaire de
, c'est-à-dire, une famille de vecteurs de
vérifiant
On pose
égalité que l'on ne demandera pas de démontrer.
a) Montrer que
et qu'il existe une chambre de Weyl
C telle que
.
b) Soit
fixé. On pose
.
Montrer que
C+i et
C-i sont des parties ouvertes telles que
et
. En déduire que
C =
C+i.
c) En déduire que
C(
B) =
C. On dit que
C(
B) est la
chambre de Weyl fondamentale relativement à
B.
6. Pour chacun des quatre systèmes de racines de
, hachurer d'une couleur particulière la chambre de Weyl fondamentale relativement à la base associée à l'ordre lexicographique de
.
7. a) Monter que pour toute chambre de Weyl
C de
R, il existe une base
B de
R telle que
C =
C(
B).
b) Montrer que l'application qui à une base
B de
R associe la chambre
C(
B) est une bijection de l'ensemble des bases de
R sur l'ensemble des chambres de
R.
8. Soit
B une base de
R,
R+ l'ensemble des racines positives et
R- l'ensemble des racines négatives.
a) Soient
des éléments non nécessairement distincts de
B tels que
Montrer qu'il existe
tel que
b) En déduire que si
, alors il existe
tel que
.
9. a) Montrer que le groupe de Weyl
W de
R opère simplement transitivement sur l'ensemble des bases de
R, c'est-à-dire que pour deux bases
B et
B' données de
R, il existe un unique élément
tel que
.
b) En déduire que le groupe de Weyl
W de
R opère simplement transitivement sur l'ensemble des chambres de Weyl de
R.
Partie I. Systèmes de racines dans
1. a) On a par, définition de
:
par symétrie du produit scalaire
par définition de
1. b) Puisque
, on a nécessairement
, soit
, avec
.
D'autre part, comme
, on a nécessairement
.
Finalement
d'où :
1. c) Supposons que
et que
avec
.
On a alors :
On est alors dans le cas d'égalité de l'inégalité de Cauchy-Schwarz, ce qui signifie que
est liée. Du moment qu'aucun de ces deux vecteurs n'est nul (puisqu'ils appartiennent à
), ils sont proportionnels l'un à l'autre.
On a alors nécessairement
d'après la 4ième condition pour que
soit un système de racines. Et ceci est en contradiction avec l'hypothèse de départ.
Le couple
ne peut donc prendre les valeurs (1 ; 4) et (-1 ; -4). On démontre de même, par symétrie des rôles de
et
, qu'il ne peut prendre les valeurs (4 ; 1) et (-4 ; -1).
1. d) Comme
on a
non nul dès que
est non nul, et le rapport
est défini.
On a alors :
.
On en déduit, pour toutes les valeurs de
, les valeurs de
, puis celles de
et de
, et enfin celles de
:
Remarque : les valeurs de la question
1.c) ont été écartées.
1. e) On reprend le tableau précédent, en supposant que
, donc selon
1. d) que
:
2. Prenons
et
tel que
.
Le couple
étant libre, il engendre
. Il reste à trouver le plus petit système de racines le contenant.
Pour celà, il suffit de tracer l'image de chaque vecteur par la symétrie de centre O, et par la symétrie orthogonale par rapport à la droite normale à un autre vecteur (d'après condition 2 pour que
soit un système de racines).
Alors
, soit
.
On trouve les autres vecteurs en appliquant les symétries décrites plus haut (faire un dessin), et on obtient ainsi le système de racines
:
Alors
, soit
.
On trouve les autres vecteurs en appliquant les symétries décrites plus haut (faire un dessin), et on obtient ainsi le système de racines
:
Alors
, soit
.
On trouve les autres vecteurs en appliquant les symétries décrites plus haut (faire un dessin), et on obtient ainsi le système de racines
:
: on peut prendre
, alors
.
On trouve les autres vecteurs en appliquant les symétries décrites plus haut (faire un dessin), et on obtient ainsi le système de racines
:
Partie II. Relations d'ordre dans
1. a) Pour tout
et
dans
et pour tout
dans
on a :
1. b) est réflexive : pour tout
de
on a
car
(réfléxivité de
).
est antisymétrique : pour tout
et
de
on a :
est transitive : pour tout
,
et
de
on a :
est totale : pour tout
et
de
on a :
ou
car
est totale, d'où
ou
.
est EV-compatible :
1°) Pour tout
,
et
de
on a :
2°) Pour tout
et
de
et pour tout
de
on a :
2. a) La partie à hachurer est constituée de la demi-droite
et du demi plan
.
2. b) est réflexive : en effet, pour tout
de
on a
d'où
.
est transititive :
Soient
,
et
dans
tels que
et
. Montrons que
. 4 cas sont possibles :
1°) Si
et
on a
donc
.
2°)Si
et
, il existe
, et on a alors
, d'où
, avec également
. D'où finalement
.
3°) Si
et
, il existe
, et on a alors
, d'où
, avec également
. D'où finalement
.
4°) Si
et
; il existe
et
, avec
et
. Soit
: on a alors
, d'une part, et
, d'autre part. D'où finalement
.
est antisymétrique :
Soient
et
de
tels que
et
. Montrons que
: si ce n'était pas le cas, il existerait
avec
et
, ce qui n'est pas possible.
est totale :
Soient
et
de
. Soit
et dans ce cas
par exemple. Soit
, et il existe alors
; on a alors nécessairement
ou
, d'où
ou
est EV-compatible :
1°) Soient
dans
tels que
. Si
on a
et donc
. Si
, il existe
avec
, et on a alors
avec également
, d'où
.
2°) Soient
dans
et
dans
tels que
. Si
on a
et donc
. Si
, il existe
avec
, et on a alors
avec également
, d'où
.
Partie III. Base d'un système de racines
1. a) Soit
n'appartenant pas à
.
est alors somme de deux racines positives
et
.
On a d'une part
, avec
, d'où
et donc
On a d'autre part
car dans le cas contraire on aurait
ce qui est impossible puisque
.
On a ainsi démontré que
est strictement plus petit que
. On démontre également que
est strictement plus petit que
.
est donc bien la somme de deux racines positives strictement plus petites.
1. b) On va raisonner par l'absurde : supposons qu'il existe
qui ne soit pas combinaison linéaire d'éléments de
.
s'écrit alors comme somme de deux éléments de
strictement plus petits que
(d'après 1.a) et qui ne sont pas dans
.
Faisons alors l'hypothèse de récurrence suivante au rang
:
avec
dans
et
strictement plus petit que
, pour tout
,
.
Selon l'hypothèse de départ faite sur
, il existe un terme
de cette somme qui n'est pas dans
, ce terme peut alors s'écrire comme somme
de deux éléments de
strictement plus petit que lui, et donc strictement plus petit que
.
En remplaçant
par
, on écrit
comme somme de
termes de
et qui sont strictement plus petit que lui. On ainsi prouvé l'hypothèse de récurrence au rang
. Comme elle l'était au rang 2, elle l'est pour tout entier
.
On obtient ainsi une suite strictement décroissante d'éléments de
:
. Comme elle est strictement décroissante, la suite a un nombre infini de valeurs, ce qui est en contradiction avec le fait que
est finie.
L'hypothèse de départ ne peut donc être vraie, et tout élément de
est combinaison linéaire d'éléments de
.
2. a) Si
alors
(résultats rappelés en début de partie II).
Si
, on a :
d'où
et alors
.
Si
on démontre de même que
et alors
.
2. b) Supposons que
. On a alors soit
, et l'on pose
, soit
, et l'on pose
.
Dans les deux cas on a
.
est donc somme de deux racines positives, ce qui est en contradiction avec
.
Ainsi
n'est pas dans
, et donc
d'après 2.a.