Concours de l'Ecole Nationale de l'Aviation Civile - Ingénieurs
Session 1992 (Option MP)
Epreuve optionnelle de Mathématiques (Algèbre) : Durée : 4h
L'usage d'une calculatrice est autorisé pour cette épreuve.
Si, au cours de l'épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être une erreur, il le signale sur sa copie
et poursuit sa composition en expliquant les raisons des initiatives qu'il a été amené à prendre.
Soit

un espace vectoriel sur un corps

avec

.
On appelle projecteur de

tout endomorphisme

de

qui vérifie
On se propose d'étudier quelques propriétés des projecteurs de

.
Première partie :
On se donne un projecteur

de

et on se propose de démontrer quelques propriétés élémentaires de

.
1. Montrer que

.
2. Que peut-on dire de la restriction de

à

?
3. Montrer que pour tout sous-espace vectoriel

de

on a :
 = (A \cap \text{ Im } f) \oplus \text{ Ker } f)
.
4. Montrer qu'un sous-espace vectoriel de

est stable par

si et seulement si il est somme d'un sous-espace vectoriel du noyau de

et d'un sous-espace vectoriel de l'image de

.
Deuxième partie :
On recherche ici d'autres caractéristiques des projecteurs de

.
1. Soit

un endomorphisme de

. Montrer que

est un projecteur de

si et seulement si il existe deux sous-espaces vectoriels

et

de

tels que :
On dira alors que

est la projection sur

parallèlement à

.
2. Soit

un endomorphisme de

.

désigne l'application identique de

. Montrer que

est un projecteur de

si et seulement si

en est un. Comparer le noyau et l'image de

à ceux de

.
3. Soit

et

deux endomorphismes de

. Montrer que

et

sont deux projecteurs de même image si et seulement si

et

. Donner de même une condition nécessaire et suffisante pour que

et

soient deux projecteurs de même noyaux.
Troisième partie :
On se donne deux projecteurs

et

de

. On se propose d'étudier les propriétés de

.
1. Montrer que si

on a :
\oplus (\text{ Im } f \cap \text{ Ker }g) \oplus (\text{ Ker } f \cap \text{ Im } g) \oplus (\text{ Ker } f \cap \text{ Ker } g))
. Que peut-on dire alors du produit

?
2. Montrer que

si et seulement si il existe une décomposition de

en somme directe de quatre sous-espaces vectoriels

tels que

soit la projection sur

parallèlement à

et

la projection sur

parallèlement à

.
3. Montrer l'équivalence des trois propositions suivantes :
i) 
est aussi un projecteur de

.
ii) 
.
iii) 
.
Quels sont alors le noyau et l'image de

?
Quatrième partie :
On suppose dans cette partie que

est de dimension finie

.
A. Soit

un endomorphisme de

. Montrer que la trace de la matrice carrée d'ordre

associée à

est indépendante de la base utilisée. Cette trace dite alors trace de

est notée
)
. Quelle relation y-a-t-il entre la trace de

et le rang de

si

est un projecteur ?
B. On considère

projecteurs

de

et on note

leur somme :

.
1. Montrer que si

est aussi un projecteur alors l'image de

est la somme directe des images des

pour

allant de 1 à

.
2. Montrer que

est un projecteur si et seulement si on a

pour tout couple
)
tel que

,

et

.
C. On suppose que

et

sont deux endomorphismes de

de rang 1. Montrer que si

et

sont deux projecteurs tels que

alors

ou

.
Cinquième partie :
On revient au cas général où

n'est pas forcement de dimension finie.
1. Montrer que si

est un endomorphisme de

et

un projecteur de

, on a :
2. Montrer que si

est un projecteur de

et

un endomorphisme quelconque de

, on a :
)
.
3. Etant donné deux projecteurs

et

de

, montrer que

est aussi un projecteur de

si et seulement si :
 \subset \text{ Im } g \oplus (\text{ Ker } f \cap \text{ Ker } g))
.
Sixième partie :
On suppose dans cette partie que

est de dimension 3.

étant deux projecteurs de rang 1 de

. Donner les conditions sur les positions relatives des noyaux et des images de

et

qui sont nécessaires et suffisantes pour que

soit aussi un projecteur. Determiner dans ces conditions le noyau et l'image de

et

.
Première Partie :
1. Il est clair que

.
Soit
Donc :
) = f \circ f(y) = f(y) = x)
, alors :

.
(1)
Soit

, on peut toujours l'écrire sous la forme :
 + (x - f(x)))
avec
 \in \text{ Im }f)
et
\in \text{ Ker} f)
car :
) = f(x) - f \circ f(x) = f(x) - f(x) = 0)
.
Donc
(2).
On conclut de
(1) et
(2) que :
2. Soit
)
et
 = f \circ f(y) = f(y) = x)
donc :
la restriction de
à
est l'identité.
3. La somme de

et

est effectivement directe car :
donc,
 \cap \text{ Ker } f = \lbrace 0\rbrace )
.
Soit

: on peut l'écrire sous la forme :

avec

et

et
 = f(x_1) + f(x_2) = f(x_1) = x_1)
.
donc :
)
.
Si, en plus :
)
, alors

, donc :
 \oplus \text{ Ker }f)
.
Réciproquement, si
 \oplus \text{ Ker }f)
, il s'écrit

avec

et

.
alors :
 = f(x_1) = x_1 \in A)
, donc :
)
.
4. Soit

un sev de

de la forme

avec

sev de

et

un sev de

et soit

.

s'écrit

avec

et

, donc :
 = f(x_1) + f(x_2) = f(x_1) = x_1 + 0 \in F_1+F_2)
.
Donc

est stable par

.
Réciproquement, soit

stable par

et soit

. On sait que
 \in \text{ Ker }f)
. Comme

et
 \in F)
, on a :
 \in F)
alors
 \in F \cap \text{ Ker }f)
. Donc :
 + (x - f(x)) \in (F \cap \text{ Im }f) + (F \cap \text{ Ker }f))
.
Alors
 + (F \cap \text{ Ker }f) \subset F)
, c'est-à-dire que :
 + (F \cap \text{ Ker }f))
qui est bien de la forme :

avec

sev de

et

sev de

.
Conclusion :
Deuxième Partie :
1. On a déjà vu que, si

est un projecteur, on a :

et :
 = 0)
.
Réciproquement, supposons l'existence de deux s-ev

tels que :
Tout

peut donc s'écrire :

et
 = f(x_1) + f(x_2) = 0 + x_2)
donc
 = f(x_2) = x_2 = f(x))
.
Donc

et

est un projecteur. Donc :
f est un projecteur de E ssi il existe 2 sev A,B tels que :
2. On a :
 \circ (I-f) = I-2f+f^2 = (I-f)+(f^2-f))
, donc :
 \circ (I-f) = (I-f))
ssi

.
Conclusion :

est un projecteur ssi

est un projecteur.
Supposons que

est un projecteur.
On sait que :
 = x)
, donc :
(x) = 0)
. Alors
)
.
Réciproquement, si
)
, on a
)
donc

.
On déduit que :
)
.
De même, puisque

est aussi un projecteur :
 = \text{ Ker }f)
.
Conclusion : Si

est un projecteur,
 \text{ et } \text{ Im }(I -f) = \text{ Ker }f)
.
3. Si

sont deux projecteurs de même image, on a :
 \in \text{ Im } g = \text{ Im } f)
, donc :
Alors

, de même :

.
Réciproquement, si les deux endomorphismes

et

vérifient :

.
On a
Donc

est un projecteur et, de la même façon, on trouve que

est un projecteur.
D'autre part :
 \subset \text{ Im }g)
, donc

et de même,
D'oû :
Donc

sont deux projecteurs de même image.
Les 2 endomorphismes

vérifient

ssi ce sont 2 projecteurs de meme image.
D'après
2., les 2 projecteurs

ont le même noyau ssi les 2 projecteurs

et

ont le même image donc, d'après ce qui précède, ssi
 \circ (I-g) = I-g)
et
 \circ (I-f)=I-f)
ce qui équivaut après un petit développement à :

.
Les 2 endomorphismes

vérifient :

ssi ce sont 2 projecteurs de meme noyau.
III. Troisième partie :
1. Supposons que

. Pour tout

dans

on a :
Donc
 = f(x) = g \circ f(x))
, alors
 \in \text{ Im }g)
donc

est stable par

.
En appliquant ce qu'on a vu au passage dans
I.4. à

, on a :
 \oplus (\text{ Im }g \cap \text{ Ker }f))
.
Pour tout

, on a
 = f(0) = 0 = g(f(x)))
, donc
 \in \text{ Ker }g)
. Donc

est stable par

et en appliquant à nouveau
I.4., on a
 \oplus (\text{ Ker }g \cap \text{ Ker }f))
.
En reportant dans

et en utilisant l'associativité et la commutativité de la somme directe, on obtient :
 \oplus (\text{ Im }f \cap \text{ Ker }g) \oplus (\text{ Ker }f \cap \text{ Im }g) \oplus (\text{ Ker }f \cap \text{ Ker }g))
.

est donc la somme directe de
 \oplus (\text{ Ker }f \cap \text{ Im }g) \oplus (\text{ Ker }f \cap \text{ Ker }g)))
et de
)
.
Soit
 \oplus (\text{ Ker }f \cap \text{ Im }g) \oplus (\text{ Ker }f \cap \text{ Ker }g))
,

s'écrit donc :

avec

,

et

.
On a :
 = 0 + f\circ g(x_2) + 0 = g \circ f(x_2) = g(0) = 0)
. Soit

. On a
 = x)
alors
 = f(x) = x)
.
En utilisant la caractérisation vue dans
II.1.

est la projection sur

parallèlement à
2. Supposons que

. D'après la question précédente on a :

avec :

.
On a vu au passage dans la question précédente que :

et

.
On a de même,

. Donc

est la projection sur

parallèlement à

et

est la projection sur

parallèlement à

.
Supposons que

, que

est la projection sur

parallèlement à

et que

est la projection sur

parallèlement à

.
On a, pour

la décomposition

donnant
 = f(x_1 + x_4) = x_1)
et
 = g(x_1+x_2) = x_1)
alors :
Conclusion :

(resp.

) projection sur
)
parallèlement à

(resp.

).
3. Après développement et réduction,
 \circ (f + g) - (f + g) = f \circ g + g \circ f)
, donc
i)
ii).
On a évidemment
iii)
ii).
Supposons réciproquement que

.
On a alors
 = - f \circ (g \circ f) = -(f \circ g) \circ f = (g \circ f) \circ f = g \circ f \circ f = g \circ f)
.
On a donc à la fois

et

. Ce qui n'est possible que si

.

projecteur

.
Puisque

, on peut appliquer
III.1. en profitant du fait que

car cela nous donne :

.

.
Donc

et

et aussi

.
Alors :
)
.
En écrivant alors :

avec

,

et

, on a :
(x) = x_1+x_2)
, on déduit que

est la projection sur

parallèlement à

. Donc :
Quatrième partie :
A. Soient

et

les matrices de l'endomorphisme

sur les bases

et

de

.
Si

est la matrice de passage de

à

, on a :

, donc :
 = tr(PM'P^{-1}) = tr((PM')P^{-1}) = tr(P^{-1}(PM')) = tr(M'))
(on sait que :
 \, , \, tr(AB) = tr(BA))
)
La trace de la matrice carré d'ordre

associée à

est indépendante de la base utilisée.
La relation entre la trace, la dimension et le rang est :
 = \dim(\text{ Im }f) = \text{ rg }(f))
.
B. 1. Supposons que

sont des projecteurs et que leur somme

l'est également.
Pour tout

on a :
 = \displaystyle \sum_{i=1}^{k} f_i(x) \in \displaystyle \sum_{i=1}^{k} \text{ Im } f_i)
alors :
(1).
La linéarité de la trace nous donne :
On en déduit que :
(2).
De
(1) et
(2) :
D'autre part,
 = \displaystyle \sum_{i=1}^{k} \dim(\text{ Im }f_i))
, donc la somme est directe.
Conclusion : Si

est un projecteur,

est la somme directe des
B. 2. Supposons que

est un projecteur. On peut donc appliquer ce qui précède :

, donc, pour

fixé dans

et

, on a :
) = f_j(x))
.
On peux écrire sous forme :
Et puisque la somme est directe :
 = 0)
. Donc :
Réciproquement, supposons que :

, alors :

, donc

est un projecteur.
Conclusion :

est un projecteur ssi :
C. 
sont deux projecteurs qui commutent et qui sont de rang 1, donc leurs images sont des droites vectorielles.
Si ces deux droites vectorielles sont égales, alors, d'après
II.3., on a :

et

. Mais, comme

, on a donc :

.
Si ces droites vectorielles sont distinctes, leur intersection est réduite au vecteur nul. Comme, d'après
III.1. 
est un projecteur d'image

, ce projecteur

est nul.
Si

sont 2 projecteurs de rang 1, qui commutent, alors
Cinquième partie :
1. )
est l'ensemble des

tels que
) = 0)
, donc des

tels que
 \in \text{ Ker }f)
. C'est donc
)
alors, d'après
I.3. :
2. Si
)
.
On peut l'écrire
)
et aussi
 + x_3)
avec
=0)
.
Comme

, on a aussi
 = f(g(x_2) + x_3) = f(g(x_2)) + f(x_3) = f \circ g(x_2))
. Donc
)
.
Réciproquement, soit
)
. On a déjà

.
Ensuite,

s'écrit
))
et
)
peut s'écrire

avec

et

donc
 = f(x_1) = x_1)
.
On a donc
 + (-x_2) \in \text{ Im }g + \text{ Ker }f)
, donc
3. 
deux projecteurs.
Suposons que

est un projecteur. Soit
)
. Donc
 = x)
et
Puisque, a fortiori,

. Donc
 = \text{ Ker }(f \circ (I - g)))
. D'où l'inclusion :
Réciproquement, supposons que :
Pour tout

, on a donc :
 \circ f \circ g(x) = 0)
, donc :
 = f \circ g \circ f \circ g(x))
.
Alors :
 = f \circ g \circ f \circ g(x))
, donc

est un projecteur.
On obtient l'équivalence suivant :

est un projecteur
Comme

est un projecteur, on peut appliquer
V.1. :
) = \text{ Ker }(I - g) \oplus (\text{ Ker }f \cap \text{ Im }(I-g)) = \text{ Im }g \oplus(\text{ Ker }f \cap \text{ Ker }g))
.
D'autre part, on applique
V. 2. :
 = \text{ Im }f \cap (\text{ Im }g + \text{ Ker }f))
, l'équivalence précédente devient :

est un projecteur ssi
Sixième partie :
Si

alors

qui est un projecteur.
Si

n'est pas inclus dans

alors, puisque

est une droite vectorielle et

un plan vectoriel, on a :

. La condition
V. 3.se simplifie alors et devient :

projecteur
Si

, cette condition est vérifiée puisque
 = \text{ Im }g \oplus \text{ Ker }g = E)
.
Si

, ces deux plans distincts d'un espace de dimension 3 se coupent suivant une droite.
)
est de dimension 2.
)
est alors un plan; la condition est réalisée si la droite

est dans ce plan. On ne peut en dire plus.
Récapitulatif :

projecteur ssi
Si

sont des projecteurs de rang 1, et que la condition précédente soit vérifiée ou non, le rang de

est inférieur ou égal au rang de

. Il vaut donc 0 ou 1.
S'il vaut 0,

est l'application nulle. Son noyau et son image sont évidents.
Par contre, s'il vaut 1, comme
)
est contenue dans

,
)
est nécessairement égal à

. Le noyau de

est de dimension 2 et il contient le noyau de

, qui est de dimension 2; donc
 = \text{ Ker }g)
.
On a des conditions symétriques pour

.
Le fait que

soit un projecteur ne restreint pas le nombre de cas possibles :
Avec

, c'est-à-dire la droite

incluse dans le plan

, peut-être, ou non, incluse dans le plan

. Donc

peut être nul comme il ne peut pas l'être.
Pour assurer
)
, on choisit d'abord deux plans qui seront

, puis une droite non contenue dans

et qui sera

. On est sûr alors que
)
est au moins de dimension 2. On prend dedans une droite non contenue dans

et qui sera

. Tout cela est faisable avec

ou

nuls ou non.
Nous ne pouvons donc préciser les conclusions que nous avions données alors que nous ne supposions pas

projecteur.