Dans ce chapitre,
désigne un corps commutatif (en général:
ou
).
I. Applications multilinéaires
1. Généralités
Définition :
Soient
,
des
-ev.
Une application
est dite
multilinéaire ou plus précisément
-linéaire si et seulement si
est linéaire par rapport à chaque variable, c'est-à-dire :
,
,
,
,
,
,
,
:
Si
, on dit que
est
une forme -linéaire.
Si
, on dit que
est une
application bilinéaire.
Proposition :
L'ensemble
des applications
-linéaires de
vers
est un
-ev.
2. Application multilinéaire alternée
Soient
un
-ev, et
Définition :
Une application
-linéaire
est dite
alternée si et seulement si, pour tout couple
tel que
, et pour tout
:
On note
l'ensemble de ces applications. Et si
, on notera cet ensemble
à la place de
Remarque :
est l'ensemble des formes
linéaires alternées sur le
ev
.
Proposition :
L'ensemble
des formes
linéaires alternées sur le
ev
de dimension
est un
ev de dimension
.
Proposition :
Une application
-linéaire
est alternée si et seulement si:
,
:
Proposition :
Soient
une application
linéaire alternée, et
.
Si
est liée, alors
Proposition :
Si
, alors la seule application
linéaire et alternée de
dans
est l'application nulle.
II. Notion de déterminant
1. Déterminant d'une famille de vecteurs
Définition :
Soient
une base de
,
une famille de vecteurs de
.
On appelle
déterminant de la famille dans la base
le scalaire
.
où : pour chaque
,
sont les composantes de
dans
:
Remarques :
Si la formule est complexe, elle est néanmoins parfois utile et il est recommandé de la connaître.
.
Théorème :
Soit
un
ev de dimension
muni d'une base
.
L'application
est une forme
linéaire alternée non nulle.
Proposition :
Soit
un
ev de dimension
muni d'une base
L'application
est linéaire en chacune de ses variables.
L'application
s'annule sur les familles liées.
L'application
est vecteur directeur de
, c'est-à-dire:
,
:
Théorème : (Changement de base)
Soient
et
deux bases d'un
ev
de dimension
.
:
.
Remarque :
Si
et
sont deux bases de
, alors
Théorème : (Caractérisation des bases)
Soit
un
ev de dimension
muni d'une base
et soit
une famille de vecteurs de
.
Les propositions suivantes sont équivalentes :
(i) est une base de
.
(ii) .
2. Déterminant d'un endomorphisme
Théorème :
Soient
un endomorphisme d'un
ev
de dimension
et
une base de
,
:
Définition :
Soient
un endomorphisme d'un
ev
de dimension
et
une base de
.
On appelle
déterminent de et on note
le scalaire:
Corollaire :
Le déterminant d'un endomorphisme d'un
ev ne dépend pas du choix de la base de ce dernier.
Proposition :
Soit
un
ev de dimension
,
:
.
:
.
:
.
:
.
3. Déterminant d'une matrice carrée
Soit
Définition :
Soit
. On appelle
déterminant de , et on note
ou
, l'élément de
défini par :
Remarque :
On ne calcule le déterminant que de
matrices carrées.
Proposition :
Soient
un
ev de dimension
,
une base de
,
une famille de vecteurs de
,
, on a:
Proposition :
Soient
un
ev de dimension
,
,
une base de
,
, on a:
Remarque :
Tout problème de calcul de déterminant d'un endomorphisme, ou d'une famille de vecteurs dans une base, se ramène à un problème de calcul de déterminant d'une matrice carrée.
III. Techniques de calcul des déterminants
1. Déterminants des matrices carrées d'ordre 2 et d'ordre 3
Définition - Proposition : (Matrices carrées d'ordre 2)
Le déterminant d'une matrice carré d'ordre 2 est le produit des éléments de la diagonale moins celui de ceux dans l?antidiagonale.
Exemples :
Soit
Définition - Proposition : (Matrices carrées d'ordre 3)
Soit
. On a :
Exemple :
Soit
Remarque :
Cette relation est très difficile à apprendre, néanmoins, il existe une méthode très simple pour retrouver ce résultat sans l'avoir en tête, c'est
la règle de Sarrus
Règle de Sarrus pour le calcul des déterminants des matrices d'ordre 3 :
On écrit à droite de la matrice ses deux premières colonnes et on additionne les produits obtenus en multipliant les éléments sur les diagonales, pris avec le signe
pour les produits qui sont parallèles à la diagonale principale et avec le signe
pour les autres.
On obtient aisément :
Remarque :
La règle de Sarrus reste valable pour les déterminants des matrices d'ordre 2...
La règle de Sarrus n'est pas applicable pour le calcul des déterminants des matrices d'ordre
.
2. Développement par rapport à une rangée
Soit
Définition :
Soit
.
Pour chaque
, on appelle
mineur de la place dans (ou encore, par abus de langage :
mineur de dans ), le déterminant
d'ordre
obtenu en supprimant dans
la
ligne et la
colonne:
Pour chaque
, on appelle
cofacteur de la place dans (ou encore, par abus :
cofacteur de dans ), et on note
, le produit de
par le mineur de la place
dans
:
Exemple :
Soit
On a :
et
.
Proposition :(Développement par rapport à une rangée)
Soit
. On a:
,
(développement de
par rapport à la
colonne).
,
(développement de
par rapport à la
ligne).
Exemple :
Revenons à la matrice de l'exemple précédent:
.
Il est clair que le développement par rapport à la
ligne est le plus simple:
On peut continuer le calcul en utilisant la règle de Sarrus, mais nous allons continuer de développer jusqu'à des déterminants d'ordre 2 afin de mieux illustrer la méthode.
Développent par rapport aux
lignes:
Enfin :
Remarques :
La technique du développement d'un déterminant par rapport à une rangée permet de calculer tout les déterminants, quelque soit l'ordre de la matrice carrée.
Pour les matrices d'ordre supérieur, les calculs deviennent trop longs voire ennuyeux, c'est pourquoi nous allons introduire des méthodes de simplification qui permettront de calculer les déterminants d'une façon plus ou moins aisée.
3. Opérations sur les déterminants : simplifications
Proposition : (matrices carrées triangulaires)
Le déterminant d'une matrice carrée triangulaire (inférieure ou supérieure) est égal au produit des éléments diagonaux.
Conséquence : Le déterminant d'une matrice carrée diagonale est égal au produit des éléments diagonaux.
Exemples :
Proposition : (Opérations élémentaires):
L'utilisation de la multilinéarité du déterminant peut s'avérer utile, il se traduit schématiquement par:
Pour que le déterminant d'une matrice soit nul, il faut et il suffit que la famille de colonnes de cette matrice soit liée. En particulier, si un déterminant a une colonne nulle, ou deux colonnes colinéaires, ce déterminant est nul. (Résultat analogue pour les lignes).
On ne change pas la valeur d'un déterminant en remplaçant une colonne par la somme de celle-ci et d'une combinaison linéaire des autres colonnes. (Résultat analogue pour les lignes).
On ne change pas la valeur d'un déterminant en remplaçant (simultanément) chaque colonne par la somme de celle-ci et d'une combinaison linéaire des colonnes suivantes. (Résultat analogue pour les lignes).
On ne change pas la valeur d'un déterminant en remplaçant (simultanément) chaque colonne par la somme de celle-ci et d'une combinaison linéaire des colonnes précédentes. (Résultat analogue pour les lignes).
On change le signe du déterminant en permutant deux colonnes.
Remarque :
Par opérations élémentaires, on sait triangulariser une matrice et donc calculer son déterminant.
Exemple :
Calcul de
En factorisant
et
sur les deux premières colonnes:
En opérant sur les lignes :
, on obtient:
Enfin :
4. Supplément : déterminant de Vandermonde
Définition :
Soient
et
. On appelle
déterminant de Vandermonde, et on note
, l'élément de
défini par:
Démonstration :
Il suffit d'exécuter l'opération élémentaire
sur les colonnes, et ceci en partant de
et en remontant jusqu'à
.
On obtient alors:
Développons par rapport à la première ligne :
Factorisons par ligne :
.
En répétant le processus :
D'où le résultat.
Remarque :
Le déterminant de Vandermonde est non nul ssi les
sont deux à deux distincts.
IV. Notions liées aux déterminants
1. Comatrice
Soit
Définition :
Soit
. On appelle
comatrice de la matrice carrée d'ordre
, notée
, définie par :
Où
est le cofacteur de la place
dans
.
Exemples :
Soit
, on a :
.
Soit
, on a :
Théorème :
:
Proposition :
:
2. Orientation d'un espace vectoriel réel de dimension finie
Soient
et
un
ev de dimension
. On note
l'ensemble des bases de
Définitions :
On dit que deux bases
et
de
sont :
de même sens ssi:
de sens contraires ssi:
Définitions :
On appelle
orientation de
le choix, dans l'ensemble
des bases de
, de l'une des deux classes d'équivalence modulo la relation "est de même sens que". Les bases de cette classe sont dites dans ce cas
directes, les autres bases (celles de l'autre classe) sont dites
indirectes. On dit alors que
est un
ev
orienté.
On convient que la base canonique de
est directe (ce qui revient à un choix d'orientation dans
)
On appelle
axe toute droite vectorielle orientée.
Définitions - Proposition :
Soit
. On dit que :
conserve l'orientation ssi
, dans ce cas, pour toute base
,
est une base de même sens que
.
change l'orientation ssi
, dans ce cas, pour toute base
,
est une base de sens contraire de
.