Prérequis : Les séries numériques.
I. Définitions
Soit
une partie non vide de
ou
Si
est une suite de fonctions de
dans
ou
on lui associe une nouvelle suite
définie en posant
pour chaque
; on appelle
série de fonctions de terme général et on note
le couple
On dit qu'une série de fonctions
est
simplement convergente sur
si et seulement si la série
est convergente c'est-à-dire si et seulement si la suite
admet une limite pour tout
. Si c'est le cas, on définit une nouvelle fonction
sur
en posant
La fonction
notée
est la
somme de la série
Pour toute fonction
qui est bornée sur
on pose
Le nombre
est la
norme de la convergence uniforme de
sur
S'il n'y a pas de risque de confusion, on note simplement
On dit qu'une série
est
uniformément convergente sur
s'il existe une fonction
telle que
Soit
une série de fonctions.
On dit qu'une série à termes positifs
est une
série majorante de
sur
si et seulement si
ou encore si et seulement si
On dit qu'une série de fonctions
est
normalement convergente sur
si et seulement si elle admet une série majorante convergente, ou encore si et seulement si la série
est convergente.
Une
série entière est une série de fonctions de la forme
où
est une suite de nombres réels ou complexes et où
Si
est une fonction réelle indéfiniment dérivable définie sur un intervalle ouvert contenant un point
on appelle
série de Taylor de
au point
la série de fonctions
Si
on parle de la
série de Mac-Laurin de
II. Propriétés générales
Soit
une série de fonctions définie sur une partie
de
ou
Si
converge normalement sur
alors pour tout
la série
est absolument convergente, d'où l'on voit que la série
converge simplement sur
et, pour tout
on a
Si
converge normalement sur
alors
converge uniformément sur
et si
converge uniformément sur
, alors
converge simplement sur
Voici un schéma décrivant les rapports entre les différents modes de convergence d'une série de fonctions sur un ensemble
Théorème d'interversion du passage à la limite.
Soit
une série de fonctions normalement convergente sur
et soit
. Soit
un point tel que chacune des fonctions
admette une limite au point
On pose
Alors la série
est convergente, la fonction
admet une limite au point
et on a
ou encore
On déduit de ce théorème que si les fonctions
sont toutes continues sur
et si
converge normalement sur
alors la fonction
est continue sur
Supposons que
soit une partie non majorée de
par exemple un intervalle de la forme
. Soit
une série de fonctions qui converge normalement sur
et telle que pour chaque
la fonction
admette une limite lorsque
tend vers
Alors
Bien entendu, on a un résultat analogue pour
tendant vers
.
Dans la suite,
est un intervalle de
et
est une suite de fonctions de
dans
Théorème d'interversion des intégrales.
Soient
et
des réels tels que
Si la série
converge normalement sur
la série
est convergente et on a
Soit
En appliquant le théorème ci-dessus, on voit que si les
sont toutes continues, la série des primitives des
qui s'annulent en
est simplement convergente et a pour somme la primitive de
qui s'annule en
Dérivabilité.
On suppose que les fonctions
sont toutes dérivables sur
que la série
des dérivées est normalement convergente sur
et qu'il existe
tel que la série numérique
soit convergente.
Alors la série
converge simplement sur
sa somme est une fonction dérivable et on a
III. Séries entières
Théorème.
Soit
une série entière.
Alors une et une seule des trois conditions suivantes est satisfaite :
(i) la série numérique
est divergente pour tout
(ii) il existe un réel strictement positif
tel que la série
soit divergente si
et absolument convergente si
(iii) la série
est absolument convergente pour tout
Le
rayon de convergence de la série est défini par
dans le cas
(i),
dans le cas
(ii) et
dans le cas
(iii). Dans tous les cas
est absolument convergente pour
et divergente pour
Pour
on note
et
; on pose
et
ainsi que
On appelle
disque de convergence de la série
de rayon de convergence
l'ensemble
La somme
de la série est donc définie sur
par
.
Proposition.
Soit
le rayon de convergence de
et soit
.
La série converge normalement sur
.
De cette proposition on déduit immédiatement que la somme
est continue sur le disque de convergence.
Proposition.
Les séries
et
ont le même rayon de convergence.
Dans le reste de ce paragraphe on considère une série entière
où
est une suite de nombres
réels. On suppose que le rayon de convergence
de cette série est strictement positif. On peut alors définir une fonction
en posant
.
Proposition.
La fonction
ainsi définie est indéfiniment dérivable et on a pour
et pour
On remarque que
ce qui montre que dans ce cas pour
on a
et
coïncide avec la somme de sa série de Mac-Laurin.
On peut aussi s'intéresser au problème suivant. Si
est une fonction réelle définie sur un intervalle ouvert
et si
existe-t-il une série entière
de rayon de convergence
telle que pour
on ait
? Compte tenu des résultats précedents, si la réponse est oui, la fonction
est forcément indéfiniment dérivable et
donc la seule série qui peut convenir est la série de Taylor de
au point
Malheureusement cette série peut avoir un rayon de convergence nul, ou avoir une somme différente de
Pour montrer qu'une fonction est égale à la somme de sa série de Taylor, on peut utiliser le résultat suivant.
Formule de Taylor avec reste intégral.
Si
est indéfiniment dérivable, pour tout
tout
et tout
dans
on a
IV. Exemples et contrexemples
Une suite de fonctions simplement, mais pas uniformément convergente.
Pour
soit
la fonction définie sur
par
La suite
converge simplement vers la fonction nulle sur [0,1], notée
Comme
la convergence n'est pas uniforme. Remarquons que
et que
donc
Continuité et dérivabilité.
Considérons la série
définie sur
par
On a
pour tout
et
pour
donc cette série converge simplement sur
elle est même absolument convergente en chaque point de
Mais on voit que
.
Comme
la série
est de même nature que la série
c'est-à-dire divergente. Par conséquent,
n'est pas normalement convergente. La fonction
est définie par
et
pour
Comme
la fonction
n'est pas continue en 0, bien que toutes les fonctions
le soient.
La série de fonctions
définie sur
par
admet la série
pour série majorante, donc elle converge normalement sur
Mais
et la série
ne converge même pas simplement (par exemple
diverge puisque
pour tout
Une série uniformément, mais pas normalement convergente.
Soit
la fonction définie pour
sur
par
Comme pour
fixé il y a un seul entier
pour lequel
la série
converge simplement sur
Comme
, elle converge même absolument en chaque point.
Les sommes partielles
sont définies par
et la somme
est définie par
pour tout
.
Comme
on a
et la série
converge uniformément sur
. Mais
donc la série
diverge et
n'est pas normalement convergente.
La fonction de Riemann.
On considère la série de fonctions
(définies pour
et
). Cette série diverge pour
converge simplement sur
et normalement sur tout intervalle de la forme
où
La fonction somme,
est continue et indéfiniment dérivable sur
. Pour tout
on a
.
Comportement d'une série entière sur le bord du disque de convergence.
Les séries entières
,
et
ont toutes trois le rayon de convergence
La première est divergente pour tout
tel que
la seconde est divergente pour
et semi-convergente pour
tel que
et
et la troisième est absolument convergente pour tout
tel que
Fonction qui ne coïncide pas avec la somme de sa série de Mac-Laurin.
Soit
définie par
et
si
. On démontre que
est indéfiniment dérivable au point
et que
pour tout
La série de Mac-Laurin de
est donc de rayon de convergence infini et sa somme est la fonction nulle. Or
dès que
Fonctions de Legendre.
Il s'agit de fonctions définies sur un intervalle contenant 0, qui sont somme d'une série entière et qui vérifient l'équation différentielle
où
est un nombre réel fixé.
Si
vérifie cette équation, on voit que pour tout
on a
ce qui montre que
et
déterminent tous les coefficients.
On remarque que si
il existe des solutions qui sont des polynômes de degré
c'est-à-dire des séries entières de rayon de convergence infini. Les solutions qui ne sont pas des polynômes, ont un rayon de convergence égal à 1.
Développements en série entière des fonctions élémentaires.
Pour finir, voici un récapitulatif des développements en série entière des fonctions usuelles avec leurs domaines de validité.
Remarquons que si
le développement ci-dessus de
se réduit à la formule du binôme, donc il reste vrai, mais pour tout
puisque dans ce cas le rayon de convergence est infini.