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Niveau Licence Maths 1e ann
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mais au fait qu'est ce que cette relation = ?

Posté par
jsvdb
16-07-18 à 12:14

Bonjour à tous

Je fais suite ici à une question de carpediem (c.f. Relation binaire) qui me semble intéressante sous l'angle logique : la question de l'égalité en mathématiques. Est-elle de même nature que l'égalité philosophique ? Peut-on faire des parallèles, comme on le fait avec le langage propositionnel, entre ces deux types d'égalité ?

Je n'ai pas la prétention de répondre de façon tranchante à ces deux questions. En tout cas, surement pas sur la nature de l'égalité au sens philosophique.

Je vous propose donc de réfléchir et débattre à la nature de l'égalité mathématique à partir de la "définition" qu'en donne Bourbaki. Je mets définition entre guillemettes, car, en fait, Bourbaki ne donne pas réellement une définition, mais plutôt des schémas que doit suivre l'égalité.

Bien entendu, l'égalité ne pourra être conçue qu'entre objets mathématiques; d'où cette importance de vraiment bien distinguer les notions de "relation" et de "terme" (ou ensemble ou objet) et de bien appeler un chat un chat. Entre deux relations, on ne parlera pas d'égalité, mais plutôt d'équivalence.

Et c'est précisément à partir d'équivalence entre relations que naît la notion d'égalité entre ensembles. Voyons de près :

Soient A et B deux ensembles. Alors l'assemblage noté =AB (en notation polonaise), A = B (en notation "pratique") est une relation dite relation d'égalité.

Cette relation d'égalité doit répondre aux critères suivants :

1- Soient x une lettre, A et B deux ensembles, et R[x] une relation de la théorie considérée. Alors l'implication \blue (A = B) \Rightarrow (R[A] \Leftrightarrow R[B]) est un axiome.

Où R[A] est une relation où l'on a remplacé la lettre x par l'ensemble A. De même pour B.

Ce critère signifie, intuitivement, que si deux objets sont égaux alors ils ont les même propriétés.

2- Si R et S sont deux relations de la théorie et x une lettre, la relation \blue (\forall x)(R \Leftrightarrow S) \Rightarrow (\tau_x(R) = \tau_x(S)) est un axiome.

\tau_x(R) désigne un objet privilégié qui vérifie la relation R, s'il y en a, vue comme relation en x. (Par exemple si on considère la relation  (\forall x)(x \notin Z) alors l'objet \tau_Z((\forall x)(x \notin Z)), objet unique, est appelé l'ensemble vide et noté \emptyset)

Ce critère signifie, intuitivement, que lorsque deux propriétés R et S d'un objet x sont équivalentes, alors les objets \tau_x(R) et \tau_x(S) pris parmi ceux qui vérifient R et S, s'il y en a, sont égaux. La présence du (\forall x) dans 2- est indispensable car on veut établir l'égalité de deux objets qui vérifient R et S, vues comme des relations où l'on s'intéresse à la lettre x.

Avec ces deux critères on démontre les trois premiers théorèmes de la théorie des ensemble :

Théorème 1 - x = x

Théorème 2 - (x=y) \Leftrightarrow (y=x)

Théorème 3 - ((x=y) \textbf{ et } (y=z)) \Rightarrow (x=z)

On dira plus tard que la relation d'égalité est une relation d'équivalence ...

Enfin, si on introduit le symbole primitif " \in " et que l'on définit l'inclusion A \subset B par (\forall x)((x \in A) \Rightarrow (x \in B)), on a les théorèmes suivants :

Théorème 4 - x \subset x

Théorème 5 - ((x \subset y) \textbf{ et } (y \subset z)) \Rightarrow (x \subset z)

En revanche, la relation ((x \subset y) \textbf{ et } (y \subset x)) \Rightarrow (x = y) ne peut être démontrée.
C'est pourquoi on la pose comme axiome qui porte le nom bien connue d'axiome d'extensionnalité.

On dira plus tard que la relation d'inclusion est une relation d'ordre ...

Posté par
SkyMtn
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 12:32

Salut. On peut aussi prendre l'extensionnalité pour définition de l'égalité (ou bien la double inclusion), non ?

Posté par
jsvdb
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 12:51

Bonjour SkyMtn
Oui, on peut tout faire dans tous les sens, le tout est de rester non-contradictoire.
Je préfère la version Bourbaki (ce qui n'étonne plus personne) pour sa façon très rigoureuse de progresser dans la présentation des concepts.
Mais oui, on peut partir des théorèmes que j'ai exposés, en les prenant comme axiomes, ce qui est d'ailleurs couramment enseigné.
Mais bon, là où je trouve que ça coince méchamment dans certains exposés de théorie des ensembles, c'est la façon dont est introduit un ensemble. Il est dit que x est un ensemble s'il vérifie x = x ou un truc pas clair du même genre.

L'exposé de Bourbaki est bien plus rigoureux et lumineux dans ce domaine.

Posté par
SkyMtn
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 13:01

Dans Z [ou ZF(C)] (désolé je ne suis pas Bourbakiste ) tous les objets sont des ensembles, ce sont même les objets fondamentaux (qui peuvent être mis en relation à travers le symbole logique \in) et la phrase "il est dit que x est un ensemble si..." n'a juste aucun sens.

De manière grossière, un système à la ZF (utilisant les principes logique classique tels que le tiers exclus, l'absurde et le modus ponens) se présente en "introduisant" les objets de la théorie (ce dont on va parler) et le symbole non formalisé \in, ensuite on liste les règles qui permettent de manipuler ces objets et ainsi construire un modèle des théories mathématiques. C'est tout aussi élégant que Bourbaki je trouve

Posté par
Schtromphmol
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 14:54

Bonjour,

De ce point de vue là, pas de différence avec Bourbaki ou n'importe quel autre système axiomatique. Il y a une partie langage qui donne le contexte puis la partie axiomatique qui délimite des théories qui s'étudient dans le cadre de modèles de la théorie qui sont des classes d'objets définis par le langage, modèles qui vérifient les axiomes de la théorie et les objets de la théorie sont les objets définis par le langage pris en tant qu'objets d'un modèle.

Il peut être intéressant de s'intéresser à la théorie des modèles qui justement traite des langages, des théories, des modèles et de leur existence.

Concernant l'égalité je dirais que ça dépend du cadre mathématique et des abus qu'on s'autorise. En théorie des ensembles il arrive de parler d'égalité alors que ce n'est pas rigouresement exact du point de vue ensembliste, en théorie des types l'égalité est plus souple et ne fait qu'un avec l'équivalence propositionnelle. Une bonne (mais informelle) définition de l'égalité en mathématiques selon moi serait : "deux objets sont égaux si ils sont isomorphes en tant que (insérer la structure pertinente)".

Posté par
jsvdb
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 15:41

C'est ce que j'allais dire : peu importe ZFC ou Bourbaki; ils sont sensiblement égaux à ce niveau du débat. Mon but n'est pas, dans ce fil, de vanter l'un au détriment de l'autre, mais juste d'avoir une compréhension large de la notion d'égalité.

Posté par
Camélia Correcteur
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 15:51

Bonjour

J'ai suivi la discussion d'un peu loin, surtout que je suis plutôt incompétente sur le sujet. J'interviens à cause de la phrase de Schtromphmol

Citation :
Une bonne (mais informelle) définition de l'égalité en mathématiques selon moi serait : "deux objets sont égaux si ils sont isomorphes en tant que (insérer la structure pertinente)".


avec laquelle je ne suis pas d'accord. L'espace vectoriel \R[X] est bien isomorphe à l'espace \R^{(\N)\} mais (pour moi) ce n'est pas la même chose. De plus, que fait-on des différentes droites passant par l'origine d'un plan?

Posté par
Schtromphmol
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 16:03

\R[X] est \oplus_\N \R (et non \R^\N) selon certaines définitions...

Par exemple si on fait de l'analyse complexe, on se fiche de comment est construit \C, les différentes constructions donnent sans doute des objets très différents d'un point de vue formel, mais ce qui compte c'est qu'ils vérifient un certain nombre de propriétés. Et de fait de ce point de vue les différents \C sont indissociables.

Posté par
Camélia Correcteur
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 16:06

J'avais mis une parenthèses autour de \N, justement parce qu'il s'agit de la somme et non du produit!

Sinon, on peut toujours discuter…

Posté par
Schtromphmol
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 16:16

Camélia @ 16-07-2018 à 16:06

J'avais mis une parenthèses autour de \N, justement parce qu'il s'agit de la somme et non du produit!


Pas vu, désolé... je prétendais simplement qu'en pratique, ce qu'on met des deux côtés du signe égal dépend du contexte, et que la frontière avec des symboles "moins engagés" comme \approx \simeq \cong est parfois floue.

Posté par
Camélia Correcteur
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 16:22

Ca, d'accord!

Posté par
jsvdb
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 16:38

Si je considère comme égaux au sens de l'isomorphie tous les EV de dimension 4, comment vais-je alors distinguer \R^4 de \mathcal M_2(\R) ?

Concernant le cas de \C, effectivement, de fait, on se fiche pas mal de savoir quelle construction est utilisée et quel est l'objet formel qui est en cause. Toutes les propriétés utilisées concernent toutes constructions.

Il semble donc qu'il y ait des cas où ça arrange de mettre tout le monde dans le même panier et d'autres où il faut impérativement faire la distinction !

La pertinence de poser comme définition de l'égalité : "deux objets sont égaux si ils sont isomorphes en tant que (insérer la structure pertinente)" semble mathématiquement bancale, non ?

Posté par
SkyMtn
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 16:39

Il faut quand même distinguer les relation "être égal à" et "être isomorphe à". C'est bien parce qu'on munit des ensembles de structures particulières que l'on peut les identifier, alors que par construction ils peuvent être très différents. Par exemple avec les espaces de Hilbert L^2 et \ell^2 qui sont isométriquement isomorphes, pourtant les objets sont plutôt différents...

Posté par
Schtromphmol
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 17:27

Je soutiens toujours que "être égal" est une relation qui n'a aucun intérêt en soit... l'important c'est "être isomorphe à" et est un bon mathématicien celui qui sait quel sens il faut donner à "isomorphe".

Posté par
SkyMtn
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 17:47

Schtromphmol je suis pas tout à fait d'accord avec toi. L'égalité est une relation importante entre ensembles. Isomorphe, comme son nom l'indique, cela signifie plutôt une ressemblance entre les objets. C'est parce que des objets partagent des propriétés préservées par une correspondance parfaite (bijection), cela permet de gagner du temps quand il s'agit d'étudier des propriétés de structures.

En dehors d'un cadre de structures, les isomorphismes n'ont plus aucun intérêt. Pour reprendre mon exemple, quel lien permet d'identifier L^2 à \ell^2 hormis dans le cadre des espaces de Hilbert ?

Posté par
SkyMtn
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 17:51

Arriverons nous peut être à évoquer la théorie des catégories ?

Posté par
Schtromphmol
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 18:06

Justement, en théorie des catégories, on se fiche un peu de l'"intérieur" des objets, ce qui compte ce sont les morphismes.

Posté par
jsvdb
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 18:46

Eh bien, on va demander à l'ami Grothendieck de venir nous en parler ...

Posté par
jsvdb
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 19:15

On peut aussi étudier Bourbaki E.IV, mais là il faut commander une palette de cachet d'aspirine avant.
Je suis d'accord avec Schtromphmol, la notion d'égalité, bien qu'utile en soit, ne fait pas le poids devant celle de morphisme.
Ce qui est curieux, c'est qu'au lieu d'étudier les objets (par exemple les groupes) qui possèdent une structure donnée, comme les théories mathématiques l'ont toujours fait, la théorie des catégories met l'accent sur les morphismes et les processus qui préservent la structure entre deux objets. Il apparaît qu'en étudiant ces morphismes, on est capable d'en apprendre plus sur la structure des objets.
Je ne sais ce qu'il en est en Prépa mais cet enseignement est courant en faculté, peut-être pas sous le nom formel de "catégorie des structures", mais les idées en sont utilisée et développées en permanence.

Posté par
carpediem
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 20:21

je vois que ma question soulève un passionnant débat ...

alors pour tout vous dire : je ne suis ni pour ni  contre ... bien au contraire !! vu que je suis un peu largué dans tout ça ...

cependant je rejoins Schtromphmol dans son msg de 17h27 ... car il est vrai que dans une certaine mesure (!!) la mathématique est essentiellement le fait de pouvoir associer les différents objets rencontrés( l'association étant le morphisme ... et quand il est iso alors là c'est le pied) ... je ne sais plus quel mathématicien disait cela ...

Posté par
ThierryPoma
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 22:35

Bonsoir,

@Jsvdb : Comment vas-tu ?

Citation :
En revanche, la relation ((x \subset y) \textbf{ et } (y \subset x)) \Rightarrow (x = y) ne peut être démontrée.
C'est pourquoi on la pose comme axiome qui porte le nom bien connue d'axiome d'extensionnalité.


Après avoir bien quantifié ton énoncé, que dire alors de l'exercice 6) de la section 1 (E II.49) ?

Posté par
jsvdb
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 22:47

Bonjour ThierryPoma.
Ça essaye d'aller en ce moment et toi ?

Eh bien pour l'exercice 6 en question, l'hypothèse est qu'on a remplacé l'axiome d'extensionnalité (A1) par un autre axiome (A1'). Du coup (A1) devient un théorème.
Mais il a bien fallu poser (A1') pour démontrer (A1).
Si on ne pose pas (A1'), (A1) est non démontrable dans l'état où se trouve la théorie au moment où l'on pose de l'axiome A1; j'aurai peut-être dû préciser cette phrase en italique dans le post que tu cites.

Posté par
ThierryPoma
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 22:55

Citation :
Ça essaye d'aller en ce moment et toi ?


C'est pas le top...

Posté par
jsvdb
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 16-07-18 à 22:59

Bon, envoie moi un mail et raconte moi tout ça ...

Posté par
carpediem
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 17-07-18 à 12:29

ben alors TP qu'est-ce qui t'arrive ?

Posté par
Camélia Correcteur
re : mais au fait qu'est ce que cette relation = ? 17-07-18 à 14:38

Il ne faut pas croire que la théorie des catégories évite tous ces problèmes. J'ai vu tout un séminaire s'énerver sérieusement pour décider si l'ensemble vide, qui est objet initial, est ou non égal à l'ensemble vide d'un ensemble donné, vu qu'il est clair qu'ils sont isomorphes. Par ailleurs les singletons, qu'en faisons-nous? Tout ça pour dire qu'au niveau de ce qu'on appelait de mon temps licence, j'ai toujours travaillé dans l'ensemble des parties d'un ensemble fixé; de plus ça permet d'oublier le paradoxe de Russell!



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